Signes d’un fœtus mort dans le ventre : comment les repérer et agir ?

7 000. C’est le nombre de familles françaises confrontées chaque année à la mort in utero, une épreuve traversée dans le silence et la stupeur, malgré l’attention renforcée portée au suivi des grossesses. Les signes d’alerte sont souvent discrets, se fondant dans les aléas ordinaires de la maternité, ce qui retarde parfois l’intervention médicale.

Parce que la parole reste difficile, l’incertitude s’installe. Pourtant, des dispositifs existent : accompagnement psychologique, soutien administratif, repères pour traverser la tempête. Chaque famille, chaque histoire, se fraye un chemin entre ressources, causes, étapes du deuil et possibilités offertes par les structures de soutien.

Comprendre la mort in utero : définitions et causes principales

On parle de mort fœtale in utero, ou anté partum, lorsque le fœtus décède dans l’utérus, avant même que le travail n’ait commencé. En France, le terme mort in utero s’applique à partir de 14 semaines d’aménorrhée, soit un peu plus de trois mois de grossesse. Cette distinction permet de séparer les pertes du premier trimestre, généralement classées parmi les fausses couches, des décès survenant plus tard, qui relèvent alors de la mort foetale.

Les raisons qui mènent à ce drame sont nombreuses, et parfois, restent sans explication. Les examens mettent en avant différents facteurs : certains relèvent de la santé de la mère, d’autres du développement du fœtus ou du fonctionnement du placenta. Du côté maternel, l’hypertension artérielle, le diabète mal contrôlé ou des maladies auto-immunes comme le syndrome des antiphospholipides ou le lupus peuvent être en cause. Les complications placentaires, placenta praevia, décollement prématuré, sont également fréquemment impliquées.

Pour le fœtus, les anomalies chromosomiques, certaines infections ou des incidents liés au cordon ombilical figurent parmi les facteurs retrouvés. L’incompatibilité Rhésus peut aussi, dans certains cas, provoquer une anémie hémolytique grave. Malgré les investigations, il arrive que le mystère demeure, sans cause identifiée même après l’accouchement.

Faire face à une mort foetale intra-utérine nécessite une prise en charge à la fois médicale et psychologique. Selon le stade de la grossesse et la situation, une interruption médicale de grossesse (IMG) peut être envisagée, toujours coordonnée par une équipe mêlant obstétriciens, sages-femmes et spécialistes du soutien psychique.

Quels signes doivent alerter pendant la grossesse ?

Durant la grossesse, la perception des mouvements fœtaux est un repère majeur. Si les gestes du bébé se font rares, voire cessent brusquement après le second trimestre, il faut réagir sans attendre. Beaucoup de femmes racontent le passage soudain du tumulte quotidien des coups de pied à un silence inquiétant. Ce changement demande une attention immédiate.

D’autres signaux, parfois moins évidents, méritent aussi d’être connus. En voici les principaux :

  • Des douleurs abdominales inhabituelles, différentes de celles déjà ressenties auparavant.
  • Des saignements vaginaux, même minimes, qui surviennent sans raison apparente.
  • Une modification du volume de l’utérus, détectée lors d’une consultation ou ressentie par la mère.
  • Une sensation de lourdeur persistante, accompagnée d’une perte de la tension mammaire.

Un examen clinique peut révéler une dilatation du col de l’utérus sans contractions, indice évoquant une complication. En cas de doute, une échographie urgente confirme (ou non) la présence des battements cardiaques fœtaux.

Après constatation, le médecin rédige un certificat médical indispensable pour la suite des démarches, notamment l’établissement du certificat médical d’accouchement destiné à l’état civil. Si le moindre soupçon d’embryon sans vie dans l’utérus existe, il est recommandé de se rendre sans délai en clinique ou dans un service d’obstétrique. Attendre n’est jamais la bonne option.

Le parcours du deuil périnatal : étapes et ressentis

La nouvelle d’une mort fœtale in utero bouleverse tout l’univers familial en un instant. Le deuil périnatal débute dès l’annonce, souvent brutale, du décès. Les réactions varient, mais la sidération, la colère, une forme de déni parfois, s’invitent d’emblée. Vient ensuite une douleur singulière, difficile à exprimer, qui marque profondément chaque parent.

Les spécialistes décrivent un cheminement souvent jalonné de plusieurs étapes :

  • L’annonce, qui laisse place à un sentiment d’irréalité, de colère ou d’incompréhension.
  • Le temps du deuil, période où la tristesse prend toute la place et où le projet parental semble s’effondrer.
  • La quête de sens, avec ses questionnements sur les raisons, les causes, ou parfois la culpabilité, accentuée par le silence de l’entourage.

Depuis la loi du 6 décembre 2021, il est possible d’inscrire l’enfant à l’état civil. Cette reconnaissance administrative, qui permet d’ajouter le bébé décédé au livret de famille, a un poids symbolique réel pour beaucoup de parents, leur offrant un point d’appui dans leur travail de deuil.

La législation prévoit trois jours de congé de deuil pour les salariés touchés, une mesure qui, sur le terrain, se heurte souvent à la réalité de la souffrance. Hélène Martinot, psychologue, rappelle que le rythme du deuil périnatal n’appartient qu’aux parents : chacun avance à sa façon, avec des passages par le déni, la colère, la culpabilité, parfois la possibilité de retrouver un équilibre.

Partenaire soutenant sa femme enceinte dans le salon

Ressources et accompagnement : vers qui se tourner pour être soutenu

Traverser un deuil périnatal mobilise des forces considérables. Pour les parents endeuillés, s’entourer devient une nécessité. Le point de départ, c’est souvent le médecin de famille, l’obstétricien ou la sage-femme, qui peuvent diriger vers un psychologue connaissant la spécificité du deuil périnatal. Dans la plupart des établissements hospitaliers, des référents en périnatalité accompagnent ce type de situation, offrant écoute et conseils adaptés.

Les assistants sociaux sont également présents, bien que moins visibles. Ils facilitent l’accès aux droits, expliquent les démarches pour le congé maternité, orientent vers les dispositifs d’aide ou soutiennent les familles dans l’accomplissement des formalités. Une équipe pluridisciplinaire, psychologue, psychiatre, travailleur social, peut proposer un accompagnement sur mesure, pensé pour chaque histoire, chaque besoin.

Des associations spécialisées jouent un rôle clé dans ce parcours. En voici quelques-unes, pour mieux situer leurs actions :

  • Agapa
  • Petite Emilie
  • Nos tout-petits

Chacune offre des espaces d’écoute, des groupes de parole, de la documentation, parfois même un accompagnement individuel. Partager son vécu avec d’autres parents ayant traversé la même épreuve permet de rompre l’isolement et de mettre des mots sur des émotions enfouies.

L’entourage reste fondamental. Famille, amis, proches : leur présence, leur écoute authentique, la capacité à nommer l’enfant disparu sans détour, tout cela aide à reconstruire peu à peu un équilibre. Le temps du deuil n’appartient à personne d’autre qu’aux parents eux-mêmes. Il s’impose, il échappe aux calendriers, et mérite d’être respecté dans toutes ses nuances.

Perdre un enfant avant même de l’avoir serré dans ses bras laisse une marque singulière. Mais chaque histoire, chaque geste de soutien, chaque mot posé, participe à dessiner la suite du chemin.

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